L’ENTREPRISE INDIVIDUELLE
CHAPITRE 1 - L’OBJET DU DROIT COMMERCIAL
L’article 6 parle actuellement
d’activités commerciales (section 1)
, qui se distinguent de ce que le code de commerce appelle les
actes de commerce (section 2).
L’article 6 du nouveau code a énuméré un grand nombre d'activités commerciales que nous pouvons ranger dans trois secteurs :
- les activités de production
- les activités de distribution ;
- et les activités de services.
Ce sont des activités dont l’exploitation n’est pas précédées d’une circulation antérieure, autrement dit les exploitants ne vendent que leur propre
production et ne spéculent pas sur des produits qu’ils achètent.
Actuellement, les seules activités de
production de caractère commercial, sont
la recherche et l’exploitation des mines et des carrières
(art. 6-4°), c’est à dire les industries extractives.
On remarquera que l’agriculture
[1]
et la pêche, qui sont aussi des activités de production, sont restées dans le domaine civil.
Il en est de même bien entendu de la production intellectuelle (les créations de l’esprit). Restent donc encore régis par le droit civil les auteurs
d’ouvrages, les créateurs de nouvelles inventions (les inventeurs de nouveaux logiciels par exemple), le compositeur d’une œuvre musicale, l’artiste
peintre qui vendent les produits de leur création.
La distribution est l’ensemble des opérations par lesquelles les produits sont répartis entre les consommateurs.
Deux activités de distributions peuvent se dégager de l'art. 6 :
l’achat pour revente et
la fourniture.
L'achat pour revendre peut avoir pour objet aussi bien les meubles (corporels ou incorporels) ou les immeubles
[2]
.
Cet achat doit avoir lieu avec l'intention de revendre et quel que soit, en l’état ou après transformation, c'est-à-dire
qu'il s'agisse de meubles ou d'immeubles, la revente constitue une activité commerciale qu'ils soient revendus tels qu'ils ont été achetés ou après les
avoir travaillés
. Ainsi, nous pouvons intégrer dans ce secteur non seulement les industries de transformation, mais aussi certaines petites
entreprises comme la menuiserie, la boulangerie ou la pâtisserie.
Mais si le contrat de vente est un contrat à exécution instantanée, le contrat de fourniture est un contrat à exécution successive.
B -
LA FOURNITURE
C’est le contrat par lequel le fournisseur s’engage, moyennant un prix, à délivrer des produits qu’il se procure (achète) préalablement aux livraisons ou à
effectuer des services à ses clients,
de manière périodique ou continue. C’est pourquoi le contrat de fourniture est un contrat à exécution
successive.
Par conséquent, la fourniture peut concerner aussi bien les biens que les services.
Il s’agit d’activités qui consistent à exécuter un travail au profit des clients ou de mettre à leur disposition l’usage temporaire de certains biens.
Trois catégories d’activités de services se dégagent de l’art. 6.
L’objet de ces activités réside seulement dans l’information, le conseil et l’assistance aux tiers cocontractants.
C’est l’activité par laquelle une personne (le courtier) met deux personnes en relation en vue de la conclusion d’un contrat.
Par conséquent,
le courtier n’intervient d’aucune manière dans le contrat conclu entre les personnes qu’il rapproche.
Le contrat de commission est une variété de mandat en vertu duquel le commissionnaire s’engage à réaliser des opérations tels que des achats ou des
ventes pour le compte du commettant, mais en son nom personnel.
À la différence du simple
mandataire qui traite
au nom de son mandant,
le commissionnaire
contracte avec les tiers
en son nom personnel. Les tiers (les cocontractants) ne connaissent que le commissionnaire.
C’est l’ensemble des activités qui ont pour objet la spéculation sur l’argent.
L’alinéa 7 de l’article 6 mentionne
la banque, le crédit et
les transactions financières, mais il faut aussi ajouter
les assurances (al. 8) qui visent d’ailleurs
la spéculation sur l’argent (les primes d’assurance).
Que veut-on dire par activités de banque, de crédit et de finance ?
Les définitions sont désormais données par la loi bancaire.
D’après la loi bancaire, les principales activités bancaires
sont :
- la réception de fonds du public ;
- la distribution de crédits ;
- et la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement ou leur gestion.
Il consiste, d’après l’article 3 de la loi bancaire, en trois opérations, qui doivent toutes être effectuées à titre onéreux
[3]
. Ces opérations sont :
- met ou s'oblige de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne, à charge pour celle-ci de les rembourser ;
- ou prend dans l'intérêt d'une autre personne, un engagement par signature sous forme d'aval, de cautionnement ou de toute autre garantie.
Il s’agit en fait de l’activité des sociétés de financements telles que définies par l’article 10, al.3 de la loi bancaire, comme les
sociétés de crédit à la consommation. C’est donc pour ce genre d’établissements que l’article 6 du code de commerce a réservé ce concept de
transactions financières qu’il a délibérément séparé des autres concepts de la banque et du crédit.
Le code de 1996 parle des opérations d’assurances «à primes fixes », c'est-à-dire les assurances du secteur commercial, pour les distinguer des
assurances mutuelles
[4]
.
Quatre activités prévues par l'article 6 peuvent être rangées dans ce cadre.
L’art. 6-5° parle d’
activité industrielle. Il s’agit de toute activité qui consiste à effectuer des travaux sur des biens meubles
[5]
ou immeubles.
Mais à la différence avec
l'achat pour revente après transformation où il y a
achat de la matière première qui sera transformée pour être
revendue,
l'article 6 désigne par activités industrielles celles où les produits ou matières premières sont fournis à l'industriel par ses clients
à charges pour lui de les leur restituer après transformation.
La location est une activité de service en vertu de laquelle le bailleur met à la disposition de son locataire la jouissance temporaire de certains biens.
En vertu de l’art 6 - 1° et 2° toute location des biens meubles corporels (voitures, machines, bijoux,…) ou incorporels (des films) est une activité
commerciale quelle que soit l’origine de ces biens, qu’ils soient achetés ou seulement loués.
La commercialité du transport se base sur le fait qu’il participe à la circulation des richesses, qu’il s’agisse du transport des personnes ou des
marchandises et quel que soit le mode de transport.
Les actes de commerce sont ceux qui ne peuvent être exercés à titre professionnel, et leur pratique, même habituelle, ne confère pas la qualité de
commerçant à celui qui en fait usage, néanmoins elle donne lieu à l’application des règles du droit commercial.
Rentrent dans cette catégorie les actes de commerce par la forme (art.9), les actes de commerce par accessoire (art.10) et les actes mixtes (art.4).
Les actes de commerce par la forme sont des actes qui sont
toujours commerciaux quelle que soit la qualité des parties (commerçants ou non commerçants) et quel que soit l’objet de l’opération qui leur donne
naissance (commerciale ou civile).
Ces actes sont la lettre de change et les sociétés commerciales.
A -
LA LETTRE DE CHANGE
Du fait que la lettre de change est un acte de commerce par la forme, il en résulte les conséquences suivantes :
1°/ Les personnes qui s’obligent par lettre de change sont soumises aux règles du droit commercial
.
2°/ La lettre de change est commerciale quelle que soit la cause pour laquelle elle a été signée (civile ou commerciale)
.
Ceci distingue la lettre de change notamment du chèque dont la nature dépend de la nature civile ou commerciale de la créance sous-jacente.
En principe, les sociétés devraient, comme les personnes physiques, obéir aux mêmes critères de la commercialité, c’est-à-dire qu’une société serait civile
ou commerciale suivant l’objet de son activité.
Cependant, la SA, la société en commandite par actions et la SARL, même ayant un objet civil, sont devenues des sociétés commerciales par la forme depuis
la législation du protectorat.
De son côté, la loi 5/96 a rendu commerciales par la forme même la société en nom collectif et et la société en commandite simple.
L’article 10 du nouveau code stipule : «
sont également réputés actes de commerce, les faits et actes accomplis par le commerçant à l’occasion de son commerce » ; ce sont donc les actes de commerce par
accessoire
.
Ces actes sont en réalité de nature civile et, lorsqu’ils sont effectués par un commerçant pour les besoins de son commerce, ils acquièrent la qualité
d’actes de commerce. Exemple, le commerçant qui achète un camion pour livrer ses marchandises, ou du mobilier pour son agence d’affaires ou des machines
pour son usine, etc.
[6]
Ce sont des actes qui sont commerciaux pour une partie et civils pour l’autre.
Exemple : un consommateur qui achète des produits ou de la marchandise chez un commerçant ; cet acte a une double qualité : il est civil pour le
consommateur et commercial pour le commerçant.
C’est le cas pour toutes les ventes au détail ou ventes à la consommation : l’acte est commercial pour le vendeur et civil pour le consommateur.
1 - La compétence judiciaire
Actuellement, avec la création des tribunaux de commerce, la loi a confié au commerçant de convenir avec le non commerçant d’attribuer la compétence au
tribunal de commerce pour connaître des litiges pouvant les opposer à l’occasion de l’exercice de l’activité du commerçant.
2 - La preuve
La jurisprudence a appliqué le principe suivant lequel
le régime des preuves s’apprécie en fonction de la personne contre laquelle la preuve doit être faite.
Par conséquent, dans un acte mixte :
- le commerçant ne peut invoquer la liberté de la preuve contre le non commerçant, il ne peut établir la preuve à l’égard de ce dernier qu’en se conformant
aux règles du droit civil (nécessité d'un écrit lorsque l’opération excède 250 dhs).
- inversement, lorsque le non commerçant doit fournir la preuve contre le commerçant, la preuve sera libre pour lui (c’est-à-dire même par témoins).
3 - La prescription
# Actuellement, avec le nouveau code, lorsqu’il s’agit des actes mixtes, cette prescription est unifiée ; l’article 5 a prévu désormais une seule
prescription de
5 ans, qu’il s’agisse de relations entre commerçants à l’occasion de leur commerce ou de relations entre commerçants et non
commerçants.
Si les activités commerciales et les actes de commerce constituent l’objet du droit commercial, le commerçant reste le sujet de ce droit.
La définition du commerçant résulte expressément de l’article 6 du nouveau code qui stipule que
la qualité de commerçant s’acquiert par l’exercice habituel ou professionnel des activités commerciales.
Toutefois cette condition est insuffisante pour définir le commerçant, une autre condition s’impose, à savoir l’exercice des activités commerciales pour
son propre compte.
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que le commerçant est celui qui exerce les activités commerciales, mais de manière habituelle ou professionnelle.
Qu’est-ce que l’habitude et qu'est-ce que la profession ?
-
L’habitude : veut dire une répétition régulière de l’activité commerciale, autrement dit, l’exercice par entreprise des activités de l’article 6
; en conséquence, l’exercice occasionnel de ces activités ne peut plus qualifier un commerçant. D’ailleurs, il ne faut pas oublier la condition
supplémentaire de l’article 6 concernant la publicité au registre du commerce.
-
La profession : doit consister dans l’exercice d’une
activité qui procure le moyen de satisfaire aux besoins de l’existence de celui qui l’exerce.
Encore faut-il qu’il le fasse pour son propre compte.
La qualité de commerçant s’acquiert en définitif par l’exercice habituel ou professionnel des activités commerciales, mais
pour son propre compte.
Autrement dit, la règle en la matière est la suivante :
celui qui exerce des activités commerciales, même s’il en fait sa profession habituelle, n’est pas un commerçant tant qu’il le fait pour le compte
d’autrui
.
Le commerce suppose
une indépendance totale dans l’exercice de la profession. Il suppose aussi un certain
risque : le commerçant peut faire des bénéfices mais il peut aussi subir des pertes ; d’où la règle : tous ceux qui exercent le
commerce pour le compte d’une autre personne et ne subissent pas de risque ne sont pas des commerçants.
Section II -
LA CONDITION JURIDIQUE DU COMMERCANT
Un commerçant doit satisfaire à des conditions relatives à la capacité commerciale et à des conditions ayant trait aux restrictions à l’exercice du
commerce.
§ I -
LA CAPACITE COMMERCIALE
Désormais, en vertu de nos textes, l’incapacité d’exercer le commerce frappe seulement le mineur et le majeur interdit, quant à la femme mariée, elle ne
fait plus partie des incapables, l'article 17 du code de commerce prévoit en effet que "
la femme mariée peut exercer le commerce sans autorisation de son mari. Toute convention contraire est réputée nulle".
Le mineur est celui qui n’a pas atteint l’âge de la majorité qui est actuellement fixé à 18
années grégoriennes révolues,
La liberté du commerce est un principe fondamental de notre droit, consacré désormais par la constitution
[7]
.
Toutefois, cette liberté du commerce est limitée par certaines restrictions.
Le non-respect de ces restrictions est puni, suivant les cas, par des sanctions disciplinaires ou administratives et même, le cas échéant, pénales.
Il arrive que certaines personnes exercent certaines professions, et cela ne les empêche pas d’exercer le commerce en parallèle. Mais cette faculté n’est
pas toujours possible, car le législateur estime, pour
différentes raisons
, que certaines professions
sont incompatibles avec l’exercice du commerce, par exemple les médecins, les avocats, les adouls, les notaires, les fonctionnaires, etc.
Il s’agit d’une autre restriction à l’exercice du commerce qui vise les commerçants ou les postulants au commerce, c’est-à-dire les personnes qui ont fait
l’objet de certaines condamnations pénales (pour vol, escroquerie, abus de confiance, émission de chèque sans provision, infractions fiscales ou
douanières, banqueroute, etc.) ou d’une liquidation judiciaire.
En outre, la déchéance commerciale emporte interdiction de diriger, toute entreprise ayant une activité économique (art 711 code de commerce).
Ces déchéances résultent de divers textes législatifs spéciaux
[8]
(ce sont des déchéances de plein droit) mais, dans certains cas, elles doivent être prononcées par jugement.
Au titre de cette restriction, le commerçant n’a pas le droit de postuler à l’exercice de certaines activités commerciales :
- lorsque ces activités sont
interdites par le législateur : par exemple l’interdiction du commerce de la fausse monnaie (art. 335 C.P.),
l’interdiction du commerce lié aux jeux de hasard (art. 282 C.P.), l’interdiction du commerce des objets et images contraires aux mœurs (art. 59 dahir
15/11/1958 formant code de la presse), le commerce des stupéfiants ;
- ou lorsque ces activités constituent un monopole de l’Etat : par exemple la recherche du pétrole et du gaz, l’exploitation et le commerce des phosphates,
le transport ferroviaire, etc.
Il s’agit de l’interdiction d’exercer certaines activités commerciales sans autorisation préalable des autorités administratives.
En effet, dans certains cas, une autorisation administrative, sous forme d’agrément ou de licence, est nécessaire avant l’ouverture du commerce ou
l’exercice de certaines activités commerciales, par exemple :
- la vente des boissons alcooliques (qui est soumise, suivant le cas, à une licence ou à une autorisation),
- les activités cinématographiques (notamment les clubs vidéo soumis à une autorisation du C.C.M.),
- les agences de voyages (qui doivent être autorisées par le ministère du tourisme),
- le transport public des personnes (soumis à des agréments du ministère du transport), etc.
En plus des obligations communes à toutes les entreprises économiques (les obligations sociales, les obligations fiscales…), le commerçant est soumis à des
obligations spéciales, les unes nouvelles, les autres traditionnelles.
En effet, dans le but d’assurer un meilleur contrôle fiscal, le code de 1996 a institué de nouvelles obligations à la charge des commerçants, il s’agit de
:
- l’obligation pour le commerçant, pour les besoins de son commerce, d’ouvrir un compte dans un établissement bancaire ou dans un centre de chèques postaux
(art.18) ;
- et l’obligation de payer par chèque barré ou par virement bancaire
, toute opération entre commerçants pour faits de commerce d’une
valeur supérieure à 10 000 dhs. L’inobservation de cette règle est passible d’une amende qui ne peut être inférieure à 6% de la valeur payée autrement que
par chèque ou virement bancaire ; les deux commerçants, c’est-à-dire le créancier et le débiteur, sont responsables solidairement du paiement de cette
amende.
Ces obligations s’ajoutent donc à celles qui sont traditionnellement spécifiques aux commerçants à savoir, la publicité au registre du commerce et la tenue
de la comptabilité.
Le R.C. a pour rôle de faire connaître les commerçants, son objectif est d’organiser une publicité juridique (non commerciale) sur le commerçant ; il
fournit aux tiers, qui sont en relation avec le commerçant, des informations relatives à sa situation juridique et à ses activités commerciales.
L’utilité de la tenue de la comptabilité, quant à elle, n’est plus aujourd’hui à démontrer, tant dans l’intérêt du commerçant (bonne gestion et moyen de
preuve) que de celui des tiers (informations sur la situation du commerçant) ou de l’Etat (contrôle des déclarations fiscales). Ajoutons que l'un des
intérêts de la comptabilité pour les commerçants réside dans la possibilité de produire leur propre comptabilité comme preuve les uns contre les autres en
cas de litige devant le tribunal, à condition qu'elle soit régulière.
Étudier le régime juridique des activités commerciales revient à relever leurs particularités par rapport aux activités civiles.
Les particularités des règles de droit commercial dans ce domaine sont diverses. A ce niveau de notre étude, on dégagera seulement certaines règles
générales, à titre d'exemple, du droit commercial qui se distinguent foncièrement de celles du droit civil.
Les règles de la capacité en matière commerciale se distinguent fondamentalement de celles du droit civil.
Pour exercer le commerce, le mineur ne doit pas seulement être émancipé, mais aussi être autorisé à faire le commerce.
Il y a solidarité entre les débiteurs lorsque chacun d’eux est personnellement tenu de la totalité de la dette.
Face à plusieurs débiteurs d’une même dette, le créancier a le choix de réclamer à chacun d’eux, individuellement ou collectivement, le paiement de la
totalité de la dette.
En
droit commun, c’est-à-dire dans les
contrats civils «la
solidarité entre les débiteurs ne se présume pas » (art. 164 D.O.C.),
elle doit être expressément stipulée dans le contrat.
Mais en matière
commerciale la solidarité est de droit : l’article 335 du code 1996 dispose : «
en matière commerciale la solidarité se présume » (V. aussi art. 165 D.O.C.). Par conséquent, et contrairement au droit civil, pour écarter
l’application de la solidarité entre les commerçants une clause spéciale doit être stipulée dans le contrat.
Les règles de forme sont celles qui gouvernent l’organisation judiciaire, le fonctionnement de la justice, les actes de procédure, le déroulement du
procès, la preuve, les décisions judiciaires, les recours, etc. Les règles du droit commercial se distinguent aussi dans ce domaine par rapport à celles du
droit civil à bien des égards.
La compétence judiciaire en matière commerciale appartient désormais aux tribunaux de commerce
[9]
.
En droit
civil, la règle en matière de preuve est clairement exprimée par l’article 443 D.O.C. qui exige la preuve par
écrit pour toute demande en justice qui
dépasse la somme de 250 dhs.
En droit
commercial, le principe est
la liberté de la preuve. C’est-à-dire que dans les affaires qui
opposent les commerçants, il n’est pas nécessaire d’établir la preuve par écrit (article 334 du code 1996).
Cependant, si une disposition législative ou une clause conventionnelle l’exige, la preuve doit être rapportée par écrit, par exemple la loi exige un écrit
en matières de vente et de nantissement du fonds de commerce, des contrats de sociétés commerciales, des effets de commerce, etc.
Ces procédures sont particulières au droit
commercial. Elles ont remplacé la procédure de la faillite prévue par l'ancien code de
commerce. Elles constituent une garantie qui a pour but de protéger les créanciers contre leurs débiteurs commerçants défaillants.
Par contre,
un non commerçant qui refuse de payer ses dettes, ne peut être assujetti à ces procédures collectives, il est déclaré en état de
déconfiture. Chaque créancier exerce son action de manière individuelle. Celui qui l’assignera en paiement le premier, sera payé
en priorité, après avoir exercé ses droits sur le patrimoine du débiteur (c’est pourquoi on parle dans ce domaine du prix de la course).
4° / La prescription
Dans le domaine
civil, le délai de prescription est de
15 ans.
Mais en matière
commerciale ce délai n’est que de
5 ans. Ce court délai s’explique :
- d’une part, par l’application du principe de la liberté de la preuve entre les commerçants ;
- d’autre part, par le fait que, par la tenue de leur comptabilité, les commerçants sont en mesure de se rendre compte de l’état de leurs créances. Par
conséquent, le délai de 5 ans est largement suffisant pour pouvoir les réclamer.
deuxième partie
Les sociétés commerciales
Il n'est pas de doute que les commerçants, personnes physiques, jouent un rôle considérable dans notre vie économique, mais le pouvoir économique des
entreprises individuelles reste très limité en comparaison avec celui des sociétés qui puisent leur force de la réunion des associés et de leurs capitaux,
avec des projets économiques plus ambitieux et des bénéfices souvent plus avantageux.
Les sociétés commerciales sont non seulement plus puissantes dans le commerce et l'industrie, mais des secteurs d'activités des plus importants ne peuvent
être exploités que par des sociétés anonymes, tels que la banque et les assurances du secteur commercial.
De plus, les sociétés, et surtout les SA, peuvent réunir d'énormes capitaux, notamment, en attirant l'épargne des ménages par l'émission des valeurs
mobilières sous forme d'actions et d'obligations.
Dans ce chapitre, on traitera dans une première section des conditions de formation du contrat de société et, dans une seconde section, des attributs, de
la dissolution et du classement des sociétés.
Une société peut être créée soit par un contrat entre plusieurs personnes, soit par un acte unilatéral de volonté par une seule personne dans le cadre
d’une SARL à «associé unique».
Le contrat de société obéit à des conditions de fond et de forme.
En vertu de l’article 982
«
la société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail, ou tous les deux à la fois, en vue
de partager le bénéfice qui pourra en résulter
».
Il se dégage de cet article que le contrat de société est soumis à trois conditions de fond qui concernent les associés, les apports, le partage des
bénéfices ; à ces conditions il convient d'ajouter une quatrième condition d'origine jurisprudentielle :
«l’affectio societatis».
S'agissant d'un contrat, les associés doivent d'abord remplir les conditions relatives à la capacité avant de s'intéresser au nombre d'associés exigé par
la loi.
Il s’agit bien entendu de la capacité de s’obliger, à savoir l’aptitude à contracter société.
Pour la souscription ou l'acquisition des parts ou actions de sociétés, les
mineurs incapables [10] doivent
être représentés par leur tuteur légal (père ou mère) ou, après autorisation du juge, par leur tuteur testamentaire ou datif, puisque l'acte de société est
considéré par le D.O.C. comme un acte de disposition (art. 11 al. 2).
A l'âge de 16 ans,
le mineur émancipé peut être actionnaire d'une SA ou d'une commandite par actions, commanditaire dans une commandite simple, ou
associé d'une SARL.
Cependant, dans les
sociétés de personnes qui nécessitent la qualité de commerçant, l’entrée d’un mineur, même émancipé, est subordonnée aux
conditions spéciales du droit commercial. Le mineur ne peut donc être associé dans une société en nom collectif, ou commandité dans une société en
commandite simple ou par actions que s'il est autorisé à faire le commerce.
Selon le principe posé par l'article 982 D.O.C. une société peut être constituée au moins par deux associés.
Quant aux sociétés commerciales, le nombre minimal d’associés varie selon le type de société : 5 pour la SA, 3 commanditaires au moins et un ou plusieurs
commandités pour la société en commandite par actions, deux pour la SARL et un seul pour la SARL à associé unique et ce, contrairement au principe de la
pluralité d’associés posé par l’article 982 D.O.C.
On distingue trois types d’apports.
Ce sont les espèces (argent) apportées par les associés pour constituer la société. Chaque associé remet aux fondateurs sa quote-part financière lors de la
constitution de la société.
Ils sont constitués par différents types de biens, autres que le numéraire, susceptibles d’être capitalisés. Ces apports peuvent être faits en pleine
propriété (la société en devient propriétaire), en jouissance (l’apporteur en reste propriétaire mais la société en a l’usage), ou encore en usufruit.
Ces apports doivent faire l’objet d’une évaluation car, une minoration de leur valeur léserait l’associé apporteur, leur majoration pourrait porter
préjudice aux autres associés, puisque l’égalité sociale ne serait pas alors respectée, ou encore aux créanciers sociaux qui seraient trompés sur la valeur
du capital garant des dettes sociales.
Pour éviter ce genre de déconvenue, les associés doivent, dans les sociétés autres que les sociétés de personnes, faire appel à des commissaires aux
apports chargés de donner, sous leur responsabilité, une valeur à ces apports.
Ils sont constitués par le savoir-faire de certains associés et ne sont possibles que dans les sociétés de personnes et, dans certaines conditions, dans
les SARL. N’étant pas saisissables, ils n’entrent pas dans la constitution du capital social (ce sont des apports non capitalisés).
La société est constituée dans le but de faire des bénéfices ou de profiter d’une économie
[11]
. Ainsi, chaque associé recevra une part des bénéfices au prorata de ses apports. Ces règles s’appliquent également à la contribution des associés aux
pertes.
C’est un élément psychologique élaboré par la jurisprudence. Il consiste dans la volonté des associés de collaborer de façon :
-
active (information, vote, etc.),
-
volontaire
- et
égalitaire, puisqu’il n’existe pas de lien de subordination entre les associés.
Pour exister, une société doit remplir des conditions de forme particulières ; elles sont identiques, à peu de chose près, pour toutes les sociétés.
C’est l’acte fondateur de la société ; il consiste dans la rédaction et la signature des statuts.
Les statuts peuvent prendre la forme d’acte sous seing privé ou d’acte authentique. Ils contiennent des indications sur :
- l’identité de la société (forme, objet social, siège social, durée, capital social, etc.),
- celle des associés apporteurs (nom, domicile, types d’apport, montant, etc.),
- ainsi que les règles de fonctionnement qui la régissent (gérance, tenue des assemblées, partage des bénéfices, etc.).
Une société ne peut être constituée que si tous les titres émis sont
souscrits par les associés.
Dans les S.A. et SARL la souscription au capital est exigée parce qu'il est possible de fractionner la libération comme nous allons le voir. Par contre,
dans les autres sociétés, les apports en numéraire doivent être libérés intégralement dès la constitution.
La
libération est l’exécution de la souscription par la réalisation de l’apport promis, soit en numéraire, soit en nature
[12]
.
En principe, la libération des apports se fait en totalité dès la constitution des sociétés. Cependant, les actions en numéraire des S.A. et les parts en
numéraire des SARL doivent être libérées lors de la souscription au moins du
quart de leur valeur nominale, mais il peut être
prévu que la libération doit être intégrale dès la souscription.
Sinon, s'agissant de la S.A., la libération des
3/4 restants doit intervenir en une ou même en plusieurs fois suivant la décision du conseil
d’administration ou du directoire dans un délai qui ne peut dépasser
3 ans à compter de l’immatriculation de la S.A. au RC.
Et pour la SARL, la libération du surplus peut intervenir en une ou plusieurs fois sur décision du gérant dans un délai qui ne peut excéder 5 ans à compter
de la date d’immatriculation.
Les apports en nature doivent être intégralement libérés lors de la constitution de toute sorte de société commerciale.
Le commissaire aux apports établit, sous sa responsabilité
[13]
, un rapport
[14]
qui décrit chacun des apports, indique le mode d’évaluation utilisé et les raisons pour lesquelles il a été adopté et affirme que la valeur des apports
correspond à la valeur nominale des actions à émettre (art. 25).
S'agissant de la SARL les commissaires aux apports sont obligatoires quand la valeur d’un des apports dépasse 100 000 dh et si le total des apports en
nature est supérieur à la valeur de la moitié du capital social (article 53).
Concernant les sociétés de personnes, l'évaluation des apports ne pose pas de problème vu la responsabilité illimitée des associés.
Cette formalité n'est prévue que pour les sociétés qui exigent un capital minimum, notamment la S.A. (art. 22) et la SARL (art. 51).
Les fondateurs de la société doivent déposer au tribunal du lieu du siège social un certain nombre de pièces notamment :
- deux copies ou deux exemplaires des statuts certifiés conformes par le représentant de la société ;
- les actes de nomination des premiers dirigeants,
- le cas échéant, le rapport du commissaire aux apports etc.
Afin d’assurer une plus grande transparence de la vie des sociétés et de protéger leurs partenaires commerciaux, des conditions de publicité ont été
rendues obligatoires.
Après le dépôt des statuts et autres pièces au tribunal, les fondateurs doivent faire une demande d’immatriculation au registre du commerce
qui permettra à la société d’acquérir la personnalité morale.
Ensuite, dans
les 30 jours de l'immatriculation
de la société au registre du commerce, les fondateurs doivent faire publier un extrait des statuts dans un journal d’annonces légales et au bulletin
officiel. Cet extrait doit mentionner les renseignements essentiels sur la constitution de la nouvelle société (forme, dénomination, siège social, durée,
montant du capital, etc.) ; il doit également contenir le numéro de l'immatriculation de la société au registre de commerce
[15]
.
Il s’agit donc d’étudier successivement les caractéristiques de la société et la fin du contrat de société.
Comme toutes les personnes juridiques, les sociétés s’identifient par un nom ; c’est la dénomination sociale, qui peut être choisie sans limitation de
possibilités.
Cette dénomination est protégée contre les usurpations et l’on peut en changer par simple modification des statuts au cours d’une assemblée générale
extraordinaire.
Le siège social, qui doit être mentionné dans les statuts, représente le domicile de la société :
- il permet de la localiser pour accomplir certaines opérations (correspondances, impôts, etc.),
- les actions en justice contre la société doivent être intentées devant le tribunal de son siège social,
- il permet aussi de déterminer le lieu des formalités de dépôt et de publicité.
La capacité des sociétés n’est pas aussi large que celle des personnes physiques. En effet, une société n’a de raison d’exister qu’en fonction d’une
activité économique (objet social). Sa capacité se limitera donc aux actes relatifs à l’objet social défini dans les statuts ; c’est la règle dite de la
spécialité ou de la
spécialisation.
Pour exercer ses droits, une société doit faire appel à des représentants qui sont obligatoirement des personnes physiques. Ces derniers accomplissent les
actes au nom de la société. Ce sont les dirigeants de la société qui remplissent cette fonction. Il s'agit de la capacité d'exercice de la société qui est
exercée par ses dirigeants.
Le patrimoine de la société se compose de l’actif, constitué par les apports en numéraire et en nature des associés et par les biens acquis par elle à
l’occasion de son activité (meubles et immeubles), ainsi que du passif, qui comprend l’ensemble des dettes de la société (les emprunts, les créances des
fournisseurs, les impôts, etc.)
[16]
La société a un patrimoine qui lui est propre. On parle d'autonomie du patrimoine,
car il ne se confond pas avec celui des associés.
Ainsi, l’actif de la société n’appartient pas aux associés qui sont seulement titulaires de droits pécuniaires et non pécuniaires envers la société par la
possession de parts ou d’actions.
Les créanciers personnels des associés ne pourront en aucun cas saisir le patrimoine social pour éteindre leurs créances. D’autre part, le passif de la
société ne peut être imputé sur le patrimoine des associés à l’exception des sociétés de personnes dans lesquelles la responsabilité des associés est
indéfinie.
Le contrat de société peut prendre fin pour différentes causes.
1. La durée
L’existence juridique de la société en tant que personne morale débute le jour de son immatriculation au registre du commerce. Sa durée ne peut excéder 99
ans sous réserve de prorogation.
2. La volonté des associés
S’ils le désirent, les associés peuvent décider de mettre fin à leur société avant l’arrivée du terme. Cette décision sera prise lors d’une assemblée
générale extraordinaire.
3. La disparition ou l’extinction de l’objet.
L’objet peut disparaître pour de nombreuses raisons (réalisation, expropriation, interdiction d’exploitation, etc.) dans ce cas, la société n’ayant plus de
raison d’exister, devra être dissoute.
Chapitre 2 – LEs types de societes
La classification des sociétés de droit privé nécessite de nombreuses distinctions. Outre la distinction entre les sociétés civiles et les sociétés
commerciales, au sein de ces dernières s'opposent les sociétés de personnes aux sociétés de capitaux ; et les SARL y occupent une place particulière. On
peut également relever l'existence des sociétés sans personnalité juridique.
La SNC est régie par les articles 3 à 18 de la loi 5/96.
Elle ne nécessite pas de capital minimal. Les apports peuvent être faits en numéraire, en nature ou en industrie ; ils donnent droit à l’attribution de
parts sociales d’égale valeur choisie par les associés.
Toutefois, la responsabilité des associés constitue une contrepartie à la faiblesse de ce capital ; en effet, ces derniers sont responsables indéfiniment
et solidairement des dettes de la société.
L’article 3 de la loi 5/96 considère que tous les associés de la SNC ont la qualité de commerçant. Partant, la capacité commerciale est requise des
associés. De fait, certaines catégories de personnes ne peuvent être associées dans la SNC ; ce sont :
- les mineurs, même émancipés, s’ils ne sont pas autorisés à faire le commerce ;
- les majeurs interdits ;
- les personnes dont la profession n’est pas compatible avec la qualité de commerçant (avocat, fonctionnaire, etc.) ;
- les personnes dont l’activité commerciale se trouve interdite à raison d’une incapacité ou d’une déchéance.
Il s'agit de déterminer les conditions de la gérance, de la cessation des fonctions du gérant et ses pouvoirs
[17]
.
Le fonctionnement de la société est assuré par un ou plusieurs gérants nommés dans les statuts (gérant statutaire) ou par acte ultérieur.
Sans stipulation des statuts, tous les associés sont gérants
[18]
.
Si le gérant est associé, sa nomination requiert l’unanimité ; dans le cas contraire, les statuts fixent librement les conditions de sa nomination.
Le gérant peut être une personne physique ou morale, dans ce dernier cas, la personne morale doit désigner son représentant qui sera responsable de la même
manière que les personnes physiques.
Le gérant doit avoir la capacité de faire le commerce, qu'il soit associé ou non ; mais n’est pas obligatoirement commerçant dans le cas où il ne ferait
pas partie de la société (il n'est dans ce cas que mandataire).
Les fonctions du gérant prennent fin par démission, incapacité, déchéance ou révocation par les associés.
- Si le gérant associé est
statutaire, sa révocation, qui doit être décidée à l’unanimité des
autres associés, entraîne automatiquement la
dissolution de la société, à moins que sa continuation ne soit prévue par les statuts ou que les
autres associés ne la décident à l’unanimité
- La révocation du gérant associé
non statutaire nécessite également l’unanimité des associés
à défaut de dispositions contraires des statuts, mais n’entraîne pas la fin de la société.
Si le gérant n’est pas associé (personne extérieure à la société), la majorité suffit pour le révoquer à défaut de conditions prévues par les statuts.
Il est habituel de distinguer les pouvoirs du gérant dans ses rapports avec les associés et dans ses rapports avec les tiers.
Dans les rapports avec les associés, le gérant peut accomplir tous les actes de gestion dans l’intérêt de la société ; toutefois, les statuts prévoient
souvent une limitation de ses pouvoirs en soumettant certains actes à l’autorisation préalable des associés (vente d’immeubles, dépenses excessives,
constitutions de sûretés, etc.).
Dans ses rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes qui entrent dans le cadre de l’objet social, par conséquent, et contrairement à
la SARL, la société n'est pas tenue par les actes du gérant qui dépassent l'objet social. Les clauses statutaires limitant les pouvoirs des gérants sont
inopposables aux tiers.
En cas de pluralité de gérants, chacun d’entre eux peut faire tous les actes conformément à l’objet social.
Les associés ont un droit de communication et d’information ; ils prennent leurs décisions en assemblée générale et peuvent difficilement sortir de la
société dans la mesure où «
l’intuitu personae» demeure le fondement de l’existence de la SNC.
Deux fois par an, les associés ont le droit de prendre connaissance (et éventuellement copie) au siège social des livres comptables, ainsi que de tous les
documents sociaux utilisés par la société au cours de son activité. A cette fin ils peuvent être assistés d’un conseiller.
Ils peuvent aussi poser des questions par écrit sur la gestion sociale, auxquelles il doit être répondu également par écrit.
Avant chaque assemblée, les gérants sont tenus de faire parvenir une information complète aux associés afin qu’ils puissent prendre leurs décisions en
toute connaissance de cause.
15 jours au moins avant la réunion, les associés reçoivent les documents comptables (bilan, compte de résultat, etc.) les rapports de gestion du gérant et,
le cas échéant, celui du commissaire aux comptes, ainsi que les résolutions proposées.
Les assemblées peuvent se tenir seulement par correspondance à l’exception de l’assemblée générale ordinaire annuelle d’approbation des comptes ou
lorsqu’une réunion est demandée expressément par un associé (article 9).
Certaines décisions sont obligatoirement prises à l’unanimité (révocation du gérant associé statutaire, continuation de la société, cession des parts,
etc.), les autres décisions peuvent être prises à une majorité fixée par les statuts.
Cette question est réglementée par l'article 15 de la loi 5/96.
L’associé qui veut vendre ses parts sociales doit obtenir l’autorisation de tous les autres associés. En effet, dans les sociétés de personnes où les
associés sont peu nombreux, ces derniers doivent se protéger contre l’intrusion de personnes indésirables dans la mesure où «
l’intuitu personae»
est très fort.
Lorsque l’agrément est refusé, l’associé doit rester dans la société ou provoquer sa dissolution par une décision de justice pour "justes motifs".
À côté des causes de dissolution communes à toutes les sociétés, il existe certaines causes particulières aux SNC.
Ainsi, en cas de problèmes graves affectant la personne des associés (décès, incapacité, faillite personnelle, etc.) ou lors de la révocation d’un gérant
associé statutaire, la société doit être dissoute, à moins que les associés ou les statuts n’en décident autrement.
En cas de décès, les associés peuvent accepter de continuer avec tout ou partie des héritiers. Si ces derniers sont mineurs, la société doit se transformer
en société en commandite simple dans laquelle ils deviendront des commanditaires.
En tout état de cause, la décision de continuer appartient en dernier recours aux associés.
Le nombre d’associés est limité à 50 ; au-delà de ce seuil, la SARL doit se transformer en SA. À défaut de régularisation dans les deux ans, la SARL sera
dissoute de plein droit.
Pour devenir associé, la capacité civile suffit, contrairement à la SNC dans laquelle la qualité de commerçant est indispensable.
Certaines activités sont interdites à la SARL, l'article 44 al. 2 de la loi dispose à ce sujet que les sociétés de banque, du crédit, de l’investissement,
de l’assurance, de la capitalisation et de l’épargne ne peuvent adopter la forme de la SARL. Cette dérogation au principe libéral s'explique par une
certaine crainte du législateur quant au crédit et à la solvabilité d'une telle société.
La SARL est dirigée par un ou plusieurs gérants, qui est obligatoirement une personne physique, associé ou non. La capacité civile suffit mais, en tout
état de cause, il ne doit pas tomber sous le coup d’interdictions ou de déchéances. D’autre part, certaines professions sont incompatibles avec la fonction
de gérant (les fonctionnaires par exemple).
La durée des fonctions de gérant relève des statuts ou de l’acte de nomination, à défaut, elle est légalement fixée à 3 ans.
Sa rémunération est fixée par les statuts ou par décision ultérieure des associés.
Le gérant de la SARL a la possibilité de démissionner et les associés peuvent le
révoquer par décision représentant au moins
trois quarts des parts sociales (art. 69).
Une révocation abusive, de même qu’une démission abusive, peut donner lieu à des dommages-intérêts au profit du gérant ou de la société. En outre, le
gérant est révocable par les tribunaux pour cause légitime, à la demande de tout associé (art. 69 al. 2).
Enfin, l’arrivée du terme ou la survenance d’un événement personnel (incapacité, déchéance, etc.) entraînent la fin des fonctions du gérant.
Ils sont identiques à ceux des gérants de la SNC (v. art. 63).
Il existe toutefois une différence quant à l’engagement de la société vis-à-vis des tiers. En effet, si pour la SNC la société est engagée dans la limite
de l’objet social, la SARL se trouve tenue de tous les actes de gestion du gérant même s’ils dépassent l’objet social, à moins de prouver que les tiers
connaissaient ce dépassement, ce qui demeure difficile en pratique car la publication des statuts ne suffit pas à constituer cette preuve.
Les limites statutaires des pouvoirs du gérant sont inopposables aux tiers.
Sa responsabilité peut être civile ou pénale.
Elle se fonde sur la théorie des obligations qui suppose trois conditions : une faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
Il existe trois types de fautes concernant la gérance :
- des fautes de gestion (mauvais contrats, emprunts trop forts, etc.) ;
- la méconnaissance ou la violation des lois et règlements en vigueur (non-respect du droit du travail, par exemple) ;
- ou encore le non-respect des statuts (lorsque le gérant outrepasse ses pouvoirs que les statuts limitent).
L’action en responsabilité
peut être intentée contre le gérant par les associés ou les tiers dans le cadre d’une
action individuelle (en cas de préjudice personnel).
En plus des infractions communes aux différentes sociétés (articles 104 à 112 : répartition de dividendes fictifs, assemblées non conformes, etc.), cette
loi a consacré un chapitre spécial aux infractions et sanctions propres aux SARL (émission de valeurs mobilières ; fausse déclaration dans les statuts sur
la répartition des parts sociales, la libération des parts ou le dépôt des fonds, etc.).
La situation des associés a trait à leur droit à l'information et la communication, à leurs pouvoirs, à leur responsabilité et à la cession de leurs parts
dans la société.
À ce sujet, les associés de la SARL ont deux prérogatives.
1 – Le contrôle permanent
: Les associés des SARL ont un droit de contrôle permanent sur la société. Ainsi, en vertu de l’article 70 al. 4, ils peuvent prendre connaissance, à toute
époque, au siège social de l’ensemble des documents sociaux relatifs aux trois derniers exercices.
2 – L’information avant les assemblées
: Quinze jours avant la tenue de chaque assemblée, le gérant doit obligatoirement faire parvenir aux associés certains documents comptables et sociaux
ainsi que les résolutions proposées, afin qu’ils puissent voter en toute connaissance de cause (article 70).
Cette assemblée est obligatoire, de même qu’une réunion demandée par un ou plusieurs associés détenant la moitié des parts sociales ou détenant, s’ils
représentent au moins le quart des associés, le quart des parts sociales (article 71 al. 4).
Elle a pour fonction principale l’approbation des comptes annuels, mais de nombreuses autres décisions peuvent être prises par les associés à cette
occasion (nomination et révocation du gérant, autorisations diverses, etc.).
Ce deuxième type d’assemblée permet de modifier les statuts.
L’assemblée générale extraordinaire concerne toutes les décisions importantes qui doivent être prises à une forte majorité. Toute modification des statuts
sera décidée par les associés représentant au moins
les trois quarts du capital social (article 75).
Cette majorité est nécessaire car les décisions prises peuvent entraîner des conséquences graves pour la société, et par conséquent pour les intérêts des
associés (changement de dénomination, de siège social, fusion, dissolution, etc.).
Contrairement à la SNC, la responsabilité des associés est limitée à leurs apports. Dans ces conditions, le montant de leurs pertes ne peut dépasser ce
qu’ils ont engagé dans la société.
Lorsqu’un associé décide de se retirer d’une SARL, il doit vendre ses parts. Nous avons vu que cette cession est difficile dans les SNC puisqu’elle
nécessite l’unanimité. Dans les SARL, la cession est plus facile, mais elle demeure encore soumise à des conditions beaucoup plus lourdes que dans les SA.
Tout d’abord, on doit signaler que la cession de parts à des
coassociés est libre ; de même que la cession au
conjoint,
ascendants ou
descendants d’un associé ou la transmission par voie de
succession, à moins que les statuts n’en disposent
autrement.
Par contre, la
cession à un tiers étranger nécessite l’agrément des autres associés (article 58).
L’associé qui désire céder ses parts doit notifier son projet à la société et à chacun de ses coassociés par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée
avec accusé de réception.
Le gérant doit consulter les associés lors d’une réunion ou, si les statuts le permettent, par consultation écrite. L’agrément peut alors être donné ou
refusé ; l’autorisation nécessite la majorité en nombre des associés représentant au moins les
3/4 des parts sociales [19]. Le
défaut de réponse dans les
30 jours de la notification vaut autorisation tacite.
En cas de refus d’agrément, si l’associé fait partie de la société depuis
moins de deux ans, il ne peut céder ses parts et doit rester dans la
société.
Section 4 –
LA DISSOLUTION DE LA SARL
On retrouve les causes communes à toutes les sociétés. La SARL n’est pas dissoute lorsqu’un jugement de liquidation judiciaire, l’interdiction de gérer ou
une mesure d’incapacité est prononcée à l’égard de l’un de ses associés. Elle n’est pas non plus dissoute par le décès d’un associé, sauf stipulation
contraire des statuts.
Il existe des raisons spécifiques à la dissolution des SARL ; ainsi, lorsque le nombre d’associés dépasse 50, elle doit se transformer en SA, à défaut de
régularisation dans les deux ans, elle sera dissoute de plein droit.
À la fin d’un exercice, si les
pertes constatées dans les documents comptables font apparaître que les
capitaux propres[20] sont
inférieurs au quart du capital social, le gérant doit, dans les trois mois, convoquer une assemblée générale extraordinaire qui décidera soit de
régulariser la situation financière (au plus tard à la clôture de l’exercice suivant), soit sa dissolution.
Remarque sur le cas particulier de la SARL à associé unique :
Il convient enfin de préciser que ces mêmes règles sont applicables à la SARL à associé unique (constitution, gérance, dissolution), ses particularités
tiendront compte du fait de l’existence d’un seul associé ; ainsi, les décisions sont-elles prises unilatéralement par l’associé unique, ce qui n’exclut
pas la tenue d’un registre des assemblées.
Ca pratique à résoudre
Cinq personnes ont pour projet de créer une société d'imprimerie, la S.A.R.L. « CHATER » :
- Ahmed, ancien relieur, est propriétaire d'un massicot
[21]
;
- Ali, retraité, est propriétaire d'un immeuble - s'il veut bien apporter son concours à la société, il s'inquiète de perdre la propriété de son bien lors
de la liquidation de la société ;
- Hassan, chômeur sans épargne, a une vraie expérience dans le domaine de l'impression et souhaite faire bénéficier à la société de son savoir-faire ;
- Jawad, jeune financier, croit en ce projet et souhaite investir tout en préservant une certaine marge de sécurité. Il veut limiter sa contribution aux
pertes tout en contrôlant la gestion de la société.
Juste après l'immatriculation de la société, il s'avère que la propriété du massicot est contestée par l'ancien associé d'Ahmed, Mourad qui souhaite le re
vendiquer.
Analysez les différents apports et leur réalisation
[1]
- Il ne peut s’agir bien entendu que des exploitations agricoles traditionnelles ; les cultivateurs et les éleveurs traditionnels ne sont pas des
commerçants même s’ils achètent leurs produits comme les semences, les engrais ou les animaux qu’ils revendent ; par contre, les exploitations
agricoles modernes (d’agroalimentaire ou d’élevage industriel) ne peuvent être exclues du domaine commercial.
[2]
Par contre, la location des immeubles reste civile.
[3]
- C’est une condition essentielle, car les prêts concédés à titre gratuit ne sont pas considérés du crédit.
[4]
Telles que la M.A.E.M. (Mutuelle d’Assurances des Enseignants du Maroc), et la M.A.M.D.A. (Mutuelle Agricole Marocaine d’Assurance) et des
organismes de prévoyance sociale telles que la M.G.P.A.P.M. (Mutuelle Générale du Personnel des Administrations Publiques du Maroc), la M.G.E.N.
(la mutuelle générale de l’éducation nationale et les organismes à caractère social telles que la CNSS (caisse nationale de la sécurité sociale) et
la CIMR (caisse interprofessionnelle marocaine de retraite).
[5]
- Certaines activités telles que la blanchisserie peuvent entrer dans cette catégorie.
[6]
- On peut encore citer les crédits que le commerçant contracte pour le développement de son entreprise, les contrats d’assurance relatifs aux
opérations commerciales (les assurances contractées en vue de l’obtention de crédits bancaires, les assurances relatives aux transports des
marchandises ou du personnel), les contrats d’assurance relatifs aux biens de l’entreprise (assurance incendie des magasins, entrepôts), les
contrats de travail conclus entre le commerçant et ses employés, l’achat ou la location d’immeubles pour l’exercice du commerce, etc.
[7]
- L’article 15 de la constitution dispose que le droit d’entreprendre demeure garanti.
[8]
- Par exemple la loi bancaire du 6/7/1993 (art 31), la profession d’agent d’affaires : dahir du 12/1/1945, les agences de voyages : dahir portant
loi du 8/10/1977, les pharmaciens : dahir du 19/2/1960, les intermédiaires d’assurances : dahir portant loi du 9/10/1977, etc.
[9]
V. Introduction les juridictions de commerce.
[10]
Qui n'ont pas atteint l'âge de la majorité légale qui est actuellement de 18 années grégoriennes révolues.
[11]
- C'est-à-dire la réalisation d’une économie au profit des associés, par exemple la réalisation d’opérations à moindre coût comme l’achat de
produits à moindre prix ; cette économie est assimilée au profit.
[12]
- MERLE (Ph.),
Droit Commercial - Sociétés Commerciales, Paris, Dalloz, 1992, p. 221.
[13]
- En plus de la responsabilité civile du fait des fautes professionnelles, les commissaires aux apports encourent l’emprisonnement de 1 à 6 mois et
une amende de 8 000 à 40 000 dh en cas d’attribution frauduleuse à un apport en nature d’une évaluation supérieure à sa valeur réelle.
[14]
- La description et l’évaluation des apports en nature qui doit être contenue dans les statuts sont justement établies sur la base de ce rapport.
[15]
Loi 21/05 promulguée par dahir du 14 février 2006 modifiant la loi 5/96, B.O. n° 5400, du 2 mars 2006 et loi 20/05 concernant la S.A.
[16]
- Il ne faut pas confondre
patrimoine social et
capital social. Alors que le premier comprend et l’actif et le passif de la société,
le capital social représente le montant des apports effectués par les associés au profit de la société, il peut être augmenté par de nouveaux
apports ou par incorporation de réserves, il peut même parfois être réduit.
[17]
S'agissant de la responsabilité civile des gérants, voir infra chapitre 3 relatif à la SARL, quant à la responsabilité pénale, elle résulte de
nombreuses dispositions de la loi 5/96.
[18]
Il faut par exemple mentionner dans les statuts que "la société sera dirigée par un ou deux ou trois…gérants nommés par assemblée générale…" ; à
défaut d'une disposition de ce genre, tous les associés seront considérés des gérants.
[19]
Ce qui veut dire une double majorité.
[20]
Capitaux propres : ensemble des ressources financières définitivement à la disposition de l'entreprise. On parle aussi de fonds propres :
ressources internes d'une entreprise (opposé à endettement, emprunt).